21.9.09

3ème vidéo de Sicile : « Au Jardin Botanique (Catania) »

13 min 30 _ avril 2009
coul. _ mini-dv
filmé à Catania en février 2008
3ème vidéographie de Sicile
[13èmes Rencontres Traverse Vidéo, Toulouse, Centre Culturel Bellegarde, mars 2010
19ème festival Côté Court, Ciné 104, Pantin, juin 2010]


Nuit du 16 au 17 février 2010

L’errance, la défaillance du point d’ancrage quand “je” filme la surface de l’eau, quand “je” perds les poissons. Les soubresauts de la quête inquiète croisent soudain la mise en route d’un moteur, plus proche, au sein du jardin, son qui se distingue des moteurs ambiants et routiers, via Etnea — le jardin botanique est pris dans les circulations folles de Catane, île aspirant au calme dans une tempête de moteurs & de voix brusques — la rue qui, montant vers le volcan invisible, à son sommet, est au summum de la cacophonie, rejoignant d’autres voies routières & le Circumetnea (le train circulant autour du volcan). Le bassin aspire au calme, à la rêverie métaphysique : trouver quelque chose au delà de la confusion, une issue à l’angoisse, passant par elle tout de même ; traversée difficile, épreuve. Accepter de se perdre dans l’errance du filmage avec cette foi que du déséquilibre peut naître autre chose.
L’ennui auquel j’étais confrontée à Catane, ce malaise éprouvé dans la perte de mes repères, dans la bousculade de ce réel là, cet ennui — “Qu’est-ce que je fais là ? Qu’est-ce que je fabrique dans cette ville, au pied du volcan que je désirais tant et que je ne vois même pas ? — cet ennui cachait, masquait une forme profonde en mutation, une métamorphose, une forme en biais, qui s’opérait à l’intérieur de moi & au cœur de l’image. Chercher un “je-ne-sais-quoi” en mouvement, la petite panique à la surface de l’eau où tout est sombre pour un moment, et le dénouement surgit avec le moteur qui sourd, s’essaie, qui embraye et s’amplifie. “Je” finis (commence) par suivre son rythme, le bruit de ce moteur dicte mon filmage et l’œil-caméra tombe sur les taches rouges des poissons qu’il avait perdues. Avec le son, il suit les gestes respiratoires, les flottements dans les reflets de ces formes oblongues dans les eaux noires.
Le dernier tableau-vidéo, muet à dominance verte, vient résoudre l’enjeu vidéographique du voir, vient dénouer l’angoisse blottie dans l’ennui par un geste brusque qui distord l’image, la porte à son sommet baroque — et “je” rejoins le petit tronçon de rue, un peu plus haut, trouvée avec joie : via Empedocle.
S.T.








— Synopsis 1 : Que se passe-t-il à contempler la surface d'un bassin ? Événements optiques & synchronie sonore dans le jardin botanique de Catane (Sicile), ville nerveuse au pied de l'Etna.

— Synopsis 2 : Tableau-vidéo baroque où l'on fait l'expérience de se perdre dans l'errance du filmage (la surface d'un bassin) avec cette foi que du déséquilibre peut naître autre chose.















Les 7 dernières minutes 23 secondes de « Au Jardin Botanique (Catania) »

2cde vidéo de Sicile : « LUCIE (Ortigia) »

28 min _ mars 2009
coul. _ mini-dv
filmé à Syracuse le 28 février 2008
2cde vidéographie de Sicile









Synopsis
La lumière extraordinaire sur la mer à Syracuse m’invite à entrer dans un mystère du lieu.
L'objectif zoome dans un détail du paysage & y demeure,
enregistre la vie de ce microcosme enchanteur.
L'image, avec les bruits alentour, se développe & réfléchit en nous.














LUCIE (Ortigia) se compose de 5 plans séquences :

Un plan fixe "carte postale", le beau paysage rose, sa ligne d'horizon rassurante.

L'ouverture (l'"entame") : la caméra touche le flot sombre, le survole, impression du volume de l'eau, de sa masse. Agitation. Inquiétude.
Puis se repose un instant sur le paysage carte postale.

Suivent 3 moments localisés sur 100 mètres au bord de l'eau.
Ortigia est le nom de la presqu'île d'où j'enregistre l'image & le son.
Lucie bleue, Lucie blanche & Lucie rose
trois phrases
28 minutes de lumière sur la mer Ionienne.

Cette lumière m'invite à lire, à entrer dans un mystère du lieu.

Le montage (filmé-monté) se fait "naturellement", sur le motif,
avec le son des lieux, les voies des visiteurs, les bruits ambiants (moteurs), le flux de l'eau, le sable et les coquillages que les vagues remuent...

Mon "je" se dissipe dans l'image-son à laquelle je m'abandonne.

Il m'a fallu un an presque jour pour jour pour admettre
la souveraineté complète du moment du filmage. Je n'ai pas coupé les plans pour les raccourcir.

J'ai finalement consenti au temps naturel du plan séquence.

Nous sommes dans le temps réel, mais s'enfoncer dans l'image,
laisser se développer les mouvements & les sons devant nos yeux
ce n'est pas naturel, c'est une expérience à laquelle nous nous prêtons.

L'objectif zoome dans un détail du paysage & y demeure, enregistre la vie de ce microcosme.

L'image se développe et réfléchit en nous.




Dans le 3ème plan, Lucie bleue (car la lumière blanche et bleue domine le nuancier chromatique), je filme "religieusement", sans bouger.

Nous sommes placés en attente devant un paysage plein de paix, saturé de lumière. Sentiment d'un temps infini, « exspectatio » [sur cette notion, lire la présentation du tryptique "Exspectatio", sur « Le problème de l’ "exspectation" » in « L’être du balbutiement -essai sur Sacher-Masoch » de Pascal Quignard, Mercure de France, 1969 : « L’attente creuse vers le fond (…) » : http://treuilsanexsp.blogspot.com/2007/11/prsentation-du-triptyque-exspectatio.html].




On touche à l'ennui, le sommeil nous frôle. Tentation de céder à la distraction pour éviter cet affront du non-événement qui pourrait nous conduire à l'angoisse du rien.

Mais enfin, si je filme, c'est que j'ai confiance en quelque chose
qui va advenir dans l'image, dans le lieu.

Ce processus de l’attente, ce temps dilué et inquiet qui cherche
à se réfléchir (exspectatio) correspond à une expérience de la prière. Filmer, prier : même quête. Chercher à jouir de la présence du lieu, le célébrer. Y être relié.

Au bout de 8 minutes, le filmage prend, un mouvement de caméra sur les flots en plongée et les vaguelettes commencent à animer
la surface, à dire, à nous raconter quelque chose.
Des lèvres murmurent.




Au 4ème plan, nous sommes nez à nez avec le mouvement à la surface de l'eau.

La perspective du paysage a disparu, nous sommes collés à la surface unidimensionnelle comme à une page en mouvement.

Osmose avec ce détail du paysage déployant ses lignes de vagues.
Partition musicale.

Par ce plan rapproché, je cherche à saisir la lumière en mode macro ce qui confère à l'image son étrangeté saturée, blanche.

Le son est plus prononcé. La précision des bruits de l'eau, des petits ressacs, envoûtent.

Cette forme de contemplation emmène le regard jusqu'à l'hypnotiser,
emmène notre corps à la sensation de bercement jusqu'au tangage.

Parfois, l'image paraît artificielle, comme fabriquée. L'"effet spécial" vient du cadrage seul, à l'intérieur duquel le tableau a bien lieu et se modifie par lui-même.




Au dernier plan séquence, la caméra aborde une autre section du bord de mer : le soleil se couche.

Une succession de quelques zooms nous font quitter le mode paysage.

Le regard de la caméra s'attache à une autre image pleine
d'une lumière magique, surnaturelle.

La mer devient une surface picturale merveilleuse.


Enfin, je cesse de filmer, nous quittons ce paysage à la ligne d'horizon vibrante & dorée.
Cette dernière image me renvoie à un film de Tacita Dean : "Le rayon vert".



Ce lieu m'invitait à le célébrer :
je n'avais jamais vu plus d'intensité & de douceur à la fois, nulle part ailleurs.

Je voulais garder la trace de ce que j'étais témoin de cette beauté douce bouleversante.

Je me suis dit : "Le paradis sur terre c'est ici" & Dante était là.
Virgile était là, déjà, tout proche, aux fontaines d'Aréthuse. Par une plaque. Mais pas que par la plaque.

Je lisais le Purgatoire, & déjà des moments de lumière éblouissaient Dante.

J'imaginais à Syracuse que telle devait être la lumière qui éblouissait Dante.

Prendre ma caméra & me mettre à filmer le lieu était encore répondre à la convocation de quelque chose de plus grand que moi.

J'obéissais avec patience au mystérieux plaisir qu'il m'était donné de voir comme Dante obéissait à Virgile, l'écoutait et le suivait.

Lucie est la sainte patronne de Syracuse. Voici ce qu'en écrit Jacques de Voragine dans la rubrique étymologique qui commence l'article
"4. SAINTE LUCIE, VIERGE":

« Lucie est ainsi nommée à partir de "lux", qui signifie « lumière ». Car la lumière est belle à voir : comme le dit Ambroise, il est de la nature de la lumière que toute grâce se donne à voir en elle.
La lumière se diffuse sans être souillée ; quelque soit l’impureté des milieux de sa diffusion, elle demeure pure. Elle suit une trajectoire linéaire, sans courbure, et traverse les plus grandes distances sans perdre de sa vitesse. Par cette origine de son nom, on voit donc que sainte Lucie a joui de la beauté sans souillure ; elle a répandu sa charité sans le moindre amour impur ; elle a suivi la trajectoire droite de son mouvement vers Dieu, sans déviation ; elle a traversé la très longue distance des œuvres divines sans être retardée par la moindre négligence. Son nom peut aussi signifier « chemin de la lumière ». »

Dans la suite de son article de « La Légende Dorée » Voragine fait dire à Lucie :
« De même que ma sœur Agathe a été donnée à Catane comme protectrice, j'ai été accordée comme médiatrice à Syracuse. »

1ère vidéo de Sicile : « Spatola (delectatio) »

5 min 40 _ IV 2008
coul. _ mini dv
filmé à Catania en février 2008
1ère vidéographie de Sicile
[21ème Festival Instants vidéo, nov. 2008
Rencontres Traverse Vidéo, mars 2009]








Quête de la délectation dans la bousculade du réel.
Souvenir du marché aux poissons de Catane ville éminemment baroque au pied de l'Etna (Sicile).


NOTES DU 1er MAI 2008

Spatola, épée, lames souples enrubannées.
Ce poisson ruban-miroir où la lumière chatoie de reflets pulsatiles comme sur un écran.
Je suis à l’interface
dans l’intervalle entre poisson et monde alentour
je m’efforce de voir, de découvrir quelque chose
et ce faisant m’absente
c’est la lumière qui m’efface, c’est elle le Lieu omnivoyeur invisible, jusqu’au rouge sang
je finis diluée par elle et les bruits, coups, tranchages, mobylettes, sonneries, interpellations, accents… le bruit infini du marché.

Le merveilleux, — la fureur —, le rien.





L’étal des spatules : théâtre d’une nature morte.
L’aspect argenté, mercure des écailles, fait jouer la lumière,
les reflets colorés comme à la surface d’un miroir. Chair animale fraîchement morte exposée telle un bijou. Joaillerie vivante.

19.9.09

Performance sur une île à Marseille

« Ce qu'il y a de pierre en moi »
2005 _ 17 min
suivi de "Cabine Luce pour Lucy" _ 6 min
coul. _ mini-dv

Performance conçue, réalisée & montée par Sandrine Treuillard
filmée par Denis Moreau & Sabine Massenet
suivie de « Cabine Luce pour Lucy » (diaporama)
_ DVD collectif "Par ce passage, infranchi…", 2006-2007, Marseille
Pour télécharger le Guide de la performance en PDF : http://www.passage-infranchi.org/treuvideo.html


Cette performance est une méditation en action sur la position debout et de dos de l'être humain.
Elle reprend des intuitions perçues lors de mes voyages en Italie, à Pompéi & sur les volcans.




1ère moitié de la performance (Exposé de dos)













Pour « Ce qu’il y a de pierre en moi », Sandrine Treuillard a réalisé un « Guide pour la performance » l’accompagnant dans le processus de lecture & les mouvements de son corps, en combinaison de plongée noire. Le film qu’elle présente ici de cette performance réalisée sur l’île Pomègues (Frioul, Marseille) interroge, par le biais de l’auto-
fiction en Lucy, la représentation du dos, cette « île du corps ».
Une partie album d’images « Cabine Luce pour Lucy » renseigne sur le processus de création de cette performance nourrie par l’histoire de l’art et la paléontologie, entre autres influences.














2cde moitié & fin de la performance (Chorégraphie)





Générique final de la performance
et album d'images « Cabine Luce pour Lucy »